Poème inédit

 

« Paradoxa »

La foule, cette masse indistincte dont chacun fait partie, ce monstre aveugle et sourd que l’on voudrait muet…

 

Mouvance de la foule qui avance et recule,

Qui adule ou condamne, vocifère ou gémit,

Qui versatile passe d’une opinion à l’autre,

Oscillant constamment entre deux positions.

 

Pusillanime masse sans cesse ballottée,

Influencée, suggestionnée, utilisée,

Levier qu’on articule, levier qu’on manipule,

Impulsive cohue qu’on manœuvre à l’envi.

 

La foule, la masse, la vox, l’opinion, la doxa !

La foule cet otage qu’on tient dans l’ignorance,

Cette entité confuse, sans substance ni contour,

Dont nul ne se démarque ni ne se reconnaît.

 

Agrégat de consciences qu’on méprise ou bafoue,

Dont les milliers de voix fusionnent en une seule.

La foule qui se fond, la foule qu’on confond,

Qu’on flatte ou qu’on punit comme un enfant rétif.

 

La foule,

Cette masse indistincte dont chacun fait partie,

Ce monstre aveugle et sourd que l’on voudrait muet,

Que l’on parque ou contient comme autant de bétail,

Domestique troupeau qu’on laisse ruminer.

 

La foule qu’on refoule et qui soudain déboule,

Humaine marée noire qui afflue et reflue,

Qui en un seul instant, portée la colère,

Se soulève et déborde de son lit trop étroit,

Provoquant la terreur de ceux qui la gouvernent.

 

La foule qui se lève, la foule qui s’éveille,

Incontrôlable vague en quête de justice,

Qui déferle violente, inondant le système,

Consciente de sa force, de son pouvoir nouveau,

Retrouvant dans l’action sa dignité perdue.

 

© Catherine Gaillard-Sarron 14.7.22