Deux poids, deux mesures!
Poème inédit
Selon que vous serez homme ou femme, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.
Deux poids deux mesures
D’un côté les hommes,
Influents
Importants
Puissants.
De l’autre les femmes,
Invisibles
Anodines
Impuissantes.
Des hommes autonomes
Des femmes captives
Des hommes décideurs
Des femmes obéissantes
Des hommes organisés
Des femmes isolées.
Aucune égalité dans ce rapport de force
Qui profitent aux hommes et pénalisent les femmes.
Des hommes qui, sous prétexte d’égalité,
Votent des lois, modifient des décrets, des amendements
Et procèdent à des réformes qui les avantagent
au détriment des femmes :
Hausse de l’âge de la retraite des femmes,
Fin de la rente de veuve à vie,
Et bientôt obligation de servir pour les femmes.
Des hommes influents qui accélèrent des procédures,
Tels ces procès en diffamation intentés par des hommes puissants
Quand les plaintes d’abus des victimes se heurtent à la prescription.
Des hommes et des institutions
qui ne sanctionnent pas le harcèlement sexuel,
Qui considèrent les féminicides comme des meurtres passionnels,
Qui traitent les violeurs avec indulgence
et classent sans suite 95% des affaires de viols,
Qui font preuve de bienveillance envers les harceleurs
et les agresseurs de tous poil et minimisent les agressions
contre les femmes en condamnant moins de 2% des abuseurs.
Des hommes qui créent des mouvements hostiles aux droits des femmes,
Qui remettent en question leurs droits en matière de santé sexuelle
et reproductive et leur droit à l’avortement.
Des hommes qui affaiblissent les protections juridiques
Et augmentent la violence sexuelle et sexiste.
Autant d’avantages et de pouvoir du côté des hommes,
De solidarité et de soutiens institutionnels à leur égard
Et de pertes sèches et de préjudices du côté des femmes.
Des femmes sans cesse pénalisées, précarisées,
Qui attendent toujours l’égalité salariale,
Une répartition équitable des tâches domestiques,
Une garantie de l’emploi après une grossesse,
Des places en crèches pour leurs enfants
Et la possibilité de concilier travail et famille
Sans conséquences négatives sur leur prévoyance et leur revenu.
Des femmes qui assument seule la charge mentale,
Le travail scolaire des enfants et la gestion de la maison.
Des femmes exclues des processus de décision,
Aussi bien à l’échelle locale que mondiale,
Des femmes qui subissent des inégalités persistantes,
Une charge élevée de travail non rémunérée qui prétérite leur carrière,
Leur situation financière à long terme
Et entraîne une réduction de leurs rentes de vieillesse.
Des femmes sujettes au chômage, à la pauvreté,
Désavantagées lors de divorces
Qui les font basculer dans la précarité.
Des femmes harcelées sexuellement,
Victimes de violences domestiques,
Menacées de mort par leur conjoint,
Violées, vitriolées, assassinées,
Taillables et corvéables à merci,
Abandonnées par la police et la justice
Qui ont d’autres chats à fouetter
Et se soucient davantage des agresseurs que de leurs victimes.
Des femmes fatiguées, lasses
De voir que les réformes se font toujours sur leur dos
Et que la moindre revendication
Apporte son retour de bâton.
Des femmes lasses, si lasses
De constater que la lutte pour l’égalité
Se heurte à une recrudescence des violences conjugales et sexuelles,
À une régression de leurs droits,
À des lois discriminatoires qui limitent leur accès à des services essentiels,
Au discrédit jeté sur celles qui dénoncent le sexisme,
À des réactions hostiles contre le féminisme,
Et à la lassitude de toutes celles et ceux qui soutiennent
et défendent ce mouvement qui n’a jamais tué personne
alors que le machisme tue tous les jours.
D’un côté les femmes,
Invisibles
Anodines
Impuissantes.
De l’autre les hommes,
Influents
Importants
Puissants.
© Catherine Gaillard-Sarron 16.9.25
Poème inédit à paraître dans La face cachée du monde – Parution fin 2025