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L’écriture est un exercice spirituel, elle aide à devenir libre.

Jean Rouaud

Vous trouverez sur cette page, des textes inédits, des chroniques, des billets d’humeur et des réflexions diverses sur des thèmes variés.

Qu’est-ce que l’inspiration? Pourquoi faire la fête ? Est-ce mal de faire bien ? Qui, de l’handicapé ou de celui qui le définit, est le plus handicapé ? Est-ce uniquement nos manques qui déterminent ce que nous sommes ? Comment se nourrir de l’autre sans le dévorer, sans l’absorber ? Faut-il avoir peur des OGM et des manipulations génétiques ?

Autant de questions qui m’interpellent et auxquelles « j’essaie » de répondre dans cette rubrique.

Celui qui médite vit dans l’obscurité ; celui qui ne médite pas vit dans l’aveuglement.

Nous n’avons que le choix du noir.

Victor Hugo

Belle lecture

La célébration de la vie ou pourquoi faire la fête?

Pourquoi faire la fête ? Pourquoi déployer en son nom autant d’énergie, d’argent, de temps ? Qu’apporte-t-elle ? Aux autres ? À soi ?

Créer apporte de l’énergie et génère de la force donc créer des relations en engendre aussi. Mais créer des relations c’est surtout chercher à faire naître de l’amour là où n’existe que l’indifférence. Et manifester la volonté de réunir, de rassembler, d’organiser une fête, c’est devenir l’artisan d’un dessein plus universel : celui de faire tourner l’amour, dans sa famille, dans la société. C’est privilégier la relation, la porter entre tous et s’en sentir responsable. L’amour est salvateur et comprendre cela c’est tout simplement contribuer au maintien de l’équilibre et de l’harmonie dans le monde.

Ainsi, pour moi, la fête est à l’image de la vie, et à l’instar de la vie qui pour donner du fruit a besoin d’une rencontre et d’amour, la fête requiert également la rencontre et l’amour pour créer du fruit : la réunion de plusieurs cœurs qui battant de concert ne veulent plus qu’être un… comme l’enfant naît de l’amour de ses parents.

Faire la fête, réunir sa famille et ses amis, c’est donc participer à une fête plus grande : celle de la vie ! car célébrer l’amour c’est célébrer la vie même ! Et l’amour, quel qu’il soit, est une énergie formidable, incomparable, qui nourrit et fortifie toutes les relations. Tout ce qui est donné en son nom fructifie et ne sera pas repris. L’amour fait fleurir la joie.

C’est pourquoi il ne faut négliger aucune occasion d’aimer et ne pas hésiter à planter, toutes les fois que cela est possible, des graines d’amour autour de soi. Profondes et solides seront alors les racines qui vous relieront à ceux que vous aimez et à la vie, nourrissant vos relations et vous protégeant de la solitude.

Car réunir, n’est-ce pas unir autour ? N’est-ce pas tendre vers l’Unité même !

Regrouper ceux qu’on aime autour de soi, c’est comprendre que nous avons besoin les uns des autres et qu’en nous aimant les uns les autres nous générons une énergie puissante, salvatrice et pacificatrice qui rejaillit sur chacun de nous et nous entraîne dans un mouvement dont la finalité même nous échappe. Car réunir, n’est-ce pas unir autour ? N’est-ce pas tendre vers l’Unité même !

Aimer, il n’y a rien de plus beau ! dit la chanson. Aujourd’hui, je sais que c’est vrai. Je l’ai appris de la vie. Parents, frères, sœurs, mari, enfants, famille, amis, autant de cœurs à aimer, autant d’occasions de donner et de recevoir amour, affection et amitié.

En vérité, rassembler ceux qu’on aime pour un repas, c’est convier l’amour à sa table : c’est créer les conditions favorables à son épanouissement et à celui de chacun des convives. C’est devenir le véhicule d’un flux extraordinaire et choisir de le faire circuler entre tous dans un désir de communion ! Ainsi, faire la fête, c’est contribuer au maintien et au développement des conditions favorables à l’amour, et l’affection et l’amitié qu’on y déploie viennent alimenter ce creuset universel où se nourrit toute existence et où se joue l’essentiel. Car sans amour, pas de vie ! Et sans les autres pas d’amour, pas d’amitié, pas de relations !

Tout est lié. Tout est mouvement ! Un grand et beau mouvement que je vois comme une spirale ascendante entraînée par le souffle et l’énergie de l’Amour. Toujours lui !

Mais existe-t-il autre chose qui soit vraiment plus important ?

 

© Catherine Gaillard-Sarron 2008

Publiè dans le recueil « Es-Tu là » 2012

Est-ce mal de faire bien

Voici notre grand défi : vivre au cœur du problème et ne pas être remis en cause par lui, telle est la joie de la liberté. » Tulku Urgyen Rinpoché 7.8.09

Est-ce mal de vouloir faire bien ?

Poser cette question n’est-ce pas mettre le doigt sur nombre de problèmes de la société et des êtres humains ?

Si on observe comment se passent les choses dans le monde, on s’aperçoit vite qu’on élimine les bons éléments, les honnêtes, les intègres et les probes du système. Qu’on fait tout pour les décourager et les démotiver. On les éjecte des endroits où ils veulent et pourraient apporter le bien et la lumière. Où ils pourraient changer les choses. Leur désir de transparence est insupportable, aveuglant. Il met en lumière la noirceur de ceux qui les fustigent. Ils dérangent, bousculent, perturbent, troublent, contrecarrent ce que d’autres ont patiemment construits dans l’ombre.  Leurs vertus sont source de moqueries. Finalement ils sont tellement impeccables que tout le monde les déteste. On ne remercie pas ces gens là, on les licencie, on les balance tant ils mettent en lumière la noirceur de ceux avec qui les engagent.  On écrase ce qu’on ne peut atteindre.  

La justice n’est pas pour les honnêtes gens mais pour les riches. Les grandes sociétés et les multinationales ne sont pas aux mains des humanistes mais de requins avides et ultralibéraux. La politique est faite pour des hommes qui ne veulent et ne voient que leur intérêts pas celui des citoyens. S’en mettre plein les poches et obtenir pouvoir et puissance, voilà à quoi sert la politique. Et la liste est longue. Tout nous pousse à comprendre que seul l’argent et le pouvoir sont importants et que pour les obtenir tous les moyens sont bons : crimes, manigances, escroqueries par milliards, coup d’état, terrorisme, dictatures, guerres etc.

Le juste vient déranger, bouleverser cet ordre qui prévaut depuis des millénaires. Alors on l’exclut du système pour que tout continue toujours pareil. Ou il part de lui-même, laissant les crabes dans leurs paniers et les loups se dévorer entre eux.

Les gens ont tellement bien intégré les rapports de force et la notion de dominant dominé qu’ils se soumettent sans discuter au système. Ils ont également si bien intériorisé le fait que la société est un lieu dangereux réservé à la compétition et à la magouille sous toutes ses formes qu’ils le cautionnent en vous empêchant, parfois, de faire aussi bien que vous pourriez le faire de crainte de vous voir déstabiliser un système dans lequel ils ont leur place et qu’il ne veulent par voir remis en question. Un système qui fonctionne très bien.

Mais nous faisons partie du problème et en acceptant cet état de fait, nous le renforçons et nous en devenons les complices en aggravant de surcroît la désertification sociale et morale qui assèche la société. Comment changer un système qui fonctionne ainsi depuis le début du monde ? On ne peut pas.

Il faut soit devenir révolutionnaire soit en sortir. Il n’y pas d’alternative.

Car, oui, il y a bel et bien deux mondes, incompatibles, celui de la lumière, de la justice, du cœur et de l’âme et celui de l’ombre, des magouilles, du crime et de l’argent.

On ne peut pas changer cela. A mon sens, la seule façon de survivre si l’on se sent du côté de la lumière et de la justice c’est de sortir de celui de l’ombre. Sinon on s’y perd corps et âme…

C’est pourquoi, rien ne change et ne changera jamais. Car les êtes justes et intègres qui pourraient changer qq chose au système en sont systématiquement élimés, par mobbing, burn out, démissions, assassinats (les juges et la mafia par ex.), au pire ils retournent leurs vestes pour s’adapter au système et au final rien ne change.

Donc tout est bien et tout peut continuer exactement pareil.

Nous sommes juste les milliards de pistons d’une machine conçue pour générer un profit dont nous ne profiterons jamais mais que nous faisons tous tourner sans nous poser véritablement de questions. Une machine, au final, qui broie sous ses pilons ceux qui la font tourner. Les esclaves des temps modernes !

Mais tous ne pensent pas ainsi, et les êtres de bonne volonté qui veulent changer les choses et qui essaient de les changer se rendent vite compte de ce cercle vicieux et  renoncent finalement à changer les choses… pour survivre.

Ils préfèrent sortir du système que de s’y perdre car ils savent qu’ils ne le changeront jamais. Ce monde appartient aux ténèbres.

Et pour contrer cette désertification morale et sociale, ils deviennent artistes, écrivains, poètes, musiciens, peintres. Ils se mettent à créer en puisant à l’intérieur d’eux-mêmes les éléments qui permettront aux autres de toucher cette vérité du doigt à travers leurs œuvres personnelle qui toutes parlent de cette universalité  contenue en chacun de nous.

Ainsi tentent-ils de freiner cette désertification morale et sociale qui pervertit les êtres. Sauver par la beauté.  Par la pureté des âmes des créateurs.

Les humains sont fait pour le bien c’est pour cela qu’ils se sentent mal quand ils ne font pas le bien…

Voir le Champ de Lynn Mac TAggart

 

© Catherine Gaillard-Sarron 7.7.13

 

Dialogue sur la solitude

La liberté intérieure a un prix, disciple, et le prix de cette individualité, trésor de toutes les créativités, est aussi de vivre chaque jour avec le poids lancinant de la solitude.

— Dis-moi, Maître Crassote, pourquoi ne suis-je pas capable de communiquer réellement, pleinement avec les autres ? Je ne ménage pas mes efforts et pourtant, en dépit des multiples tentatives et stratégies que je déploie pour y parvenir, je n’arrive jamais à établir un contact satisfaisant. Pourquoi est-ce si difficile d’entrer en relation avec l’Autre ? De le ressentir véritablement ? Pourquoi ces échecs constants ? Et comment chasser ce terrible sentiment de solitude qui m’accable ? Suis-je différent des autres ? demande le disciple.

— Tu donnes toi-même la réponse, dit Crassote en riant malicieusement ! Tu ES différent des autres ! Chacun de nous est différent. Et c’est le privilège de l’unicité : de cet être unique représenté par chacun de nous en tant qu’individu singulier. En conséquence, si chaque personne est naturellement et fondamentalement différente d’une autre, il apparaît évident qu’elle ne peut vivre et com-prendre que sa propre existence. De par ses particularités intrinsèques, elle est incapable de vivre la vie d’un autre : elle n’est pas équipée pour cela. Dis autrement, nous sommes ce que nous sommes et nous ne pouvons pas nous mettre à la place de quelqu’un d’autre ! En dépit de tous nos efforts et de notre empathie, il nous est impossible de savoir réellement ce que l’autre pense, ressent ou éprou-ve. Nous ne pouvons que l’imaginer ! Notre différence est aussi limitation.

— C’est donc cette unicité qui pose problème pour aller vers les autres ? interroge le disciple sceptique.

— Oui et non, répond le Maître en tirant sur sa barbiche, car cette différence est également le garant de notre liberté. En effet, imagine, par exemple, la liberté que pourra espérer un être cloné ? Sa vie, ses particularités physiques, psychiques même, ses potentiels lui seront connus à l’avance. Il sera aliéné, subordonné à une existence prédéfinie ; condamné à n’être que le reflet d’un autre, son miroir ! Privé de liberté, d’avenir, d’es-pérance – car même ses pensées pourront être anticipées à travers celles du « modèle original » – il ne sera plus que l’ombre, la réplique, la pâle copie d’un autre. Sa vie et son esprit décortiqués, ses possibilités et ses limites révélées, il sera démystifié, domestiqué, devenu, en quelque sorte, otage, marchandise d’un nouveau système esclavagiste et mercantile. Dépossédé de sa nature et de son essence unique – de ce qu’il devait devenir – il ne sera plus ! Plus qu’un numéro sans âme, du moins pour ceux qui l’auront conçu et certainement aussi pour ceux qui le côtoieront !

— C’est affreux, mais j’en déduis donc qu’être unique c’est aussi être libre ?

— Bien sûr, car, comme tu le comprends, notre différence est signe de liberté. Cette différence est telle, cependant, qu’elle nous isole des autres et nous empêche de nous intéresser vraiment à autrui. Semblable à des murs invisibles elle nous protège intimement mais, et c’est le paradoxe, nous retient également d’aller de l’avant. Elle nous permet, d’une certaine façon, de voir l’Autre de l’ex-térieur sans toutefois pouvoir y accéder véritablement. Nous nous côtoyons sans jamais nous mêler. Nous avons tous un monde personnel en nous et nous sommes tous un monde en soi dont nous sommes le monarque absolu. Chacun de nous à sa vision des choses qu’il voudrait imposer aux autres ! Où est la vraie réalité quand chacun à la sienne ? En exagérant un peu, on pourrait même dire que nous souffrons tous d’autisme ou d’aliénation, enfermés que nous sommes, chacun, dans une représentation du monde qui ne le représente jamais tel qu’il est !

— Alors, nous sommes tous condamnés à la solitude ? À errer comme des âmes en peine au milieu des multitudes ? reprend le disciple soudain affligé.

Amusé par la tristesse de son élève, Crassote émet une série de petits gloussements en lissant toujours sa barbichette avec application.

— Certes, reprend-il une fois calmé, à l’adresse du disciple, perplexe. On perçoit l’autre, il nous touche, nous renvoie à nous-mêmes ! On l’aime affectueusement, profondément, avec passion même, mais jamais on ne peut véritablement pénétrer ou investir son esprit. On reste toujours à côté. Il est, et nous sommes, et la somme des deux ne faisant pas un, il reste l’Autre…. inaliénable !

Vois-tu, nos chemins sont particuliers, dans le sens où chacun doit tracer le sien, seul. Et ils sont parallèles. Et si en définitive ils finissent par se rencontrer, c’est dans un infini et un temps qui nous échappent. Ainsi cette solit…

— Maître, interrompt soudain le disciple, le chemin peut-il être vertical, car si tout ce qui monte converge on peut penser que l’Infini a son fini plutôt en haut ?

— Disciple, dit Crassotte, tu ne dois pas interrompre le Maître quand il parle, mais pour répondre à ta question, l’Infini étant infini, on peut considérer qu’Il est partout ! Cela dit, revenons à notre sujet. Donc, cette solitude, disais-je – et c’est tant mieux – est également ce qui permet à chacun de préserver son autonomie. On peut en souffrir, bien sûr, mais cela peut aussi être un moteur qui nous pousse à nous dépasser, à chercher ailleurs que dans les autres les réponses à nos questions et trouver, ainsi, notre vérité. Au fond, murmure Crassote d’une voix soudain grave, si on pouvait investir un autre être on le déposséderait de son bien le plus précieux : ses pensées ! Ce serait en quelque sorte une violation d’esprit, une ingérence sacrilège, une intrusion abominable !

Chacun de nous a besoin de savoir que nul ne peut percer le secret de ses pensées, que nul ne peut violer cette sphère intime de son esprit qui recèle tout ce qu’il est profondément, intrinsèquement. C’est une protection vitale pour exister… mais cette protection-là est peut-être aussi la source de cette incapacité à aller vers les autres, car si elle nous protège, à l’instar d’une armure, empêchant l’autre de nous atteindre et de nous faire du mal, elle nous empêche également de l’at-teindre. En défendant ce sanctuaire sacré, nous rendons inaccessible à l’autre cette partie de nous-mêmes qui doit nécessairement s’investir dans la relation. En protégeant notre unicité, donc nos différences et notre liberté, nous ne pouvons plus nous fondre dans l’autre, dans le Tout, nous ne pouvons pas nous y dissoudre – véritable corps insoluble – et ressentir cette relation fusionnelle que nous recherchons désespérément depuis, peut-être, notre avant-vie. Enfermés dans notre tour d’ivoire, nous observons l’autre sans jamais nous impliquer totalement dans la relation, de peur de nous y liquéfier et de perdre notre altérité.

La liberté intérieure a un prix, disciple, et le prix de cette individualité, trésor de toutes les créativités, est aussi de vivre chaque jour avec le poids lancinant de la solitude.

—Pourtant, il me vient une idée, Maître Crassote, dit le disciple, soudain tout excité. Que la vraie communication a peut-être sa réponse en nous ! Qu’avant toute chose, peut-être, nous devons d’abord découvrir ce que nous sommes, discerner notre raison d’exister en travaillant à l’intérieur de nous-mêmes, y cherchant l’interlocuteur capable d’écoute et d’amour. On pourrait postuler, poursuit le disciple d’une voix passionnée, que le sentiment de la solitude n’existe que pour forcer l’individu à prendre conscience de ce qu’il est ! À savoir que s’il a été créé unique, donc différent et seul, ce n’est peut-être pas par hasard. Il est possible qu’il doive prendre conscience d’autre chose pour aller plus loin. Conscience de son insignifiance mais aussi de l’inter-dépendance qui lie toute chose, de sa prétention, du vide qui habite son âme… de sa solitude ! Ce qui devrait l’amener, justement, à ne pas chercher exclusivement dans les autres, son salut ou les réponses à ses questions existentielles.

La solitude interviendrait peut-être à ce niveau-là, induisant dès lors une réflexion intérieure qui pousserait l’individu à l’instauration d’une relation spirituelle. Cette dernière, dès lors, pourrait donner à son existence une dimension nouvelle et le relier, au-delà de ses espérances, à ce que son esprit recherchait infiniment, comblant alors le vide nommé SOLITUDE par la PLÉNITUDE.

— Intéressant, fait le Maître en lustrant les poils de sa barbichette grise entre son pouce et son index. Donc, si j’ai bien compris, dit-il au disciple, cette démarche, en définitive, guiderait l’individu à se relier à ses origines, au Tout, à lui faire prendre conscience de son individualité pour savoir qui il est et où il va, et lui permettrait, enfin, de se fondre pleinement et consciemment dans les autres et dans le Grand Tout sans y perdre son altérité.

— On pourrait même résumer toute cette théorie en une seule et unique phrase, s’ex-clame alors le disciple avec exaltation « va vers toi et au-delà pour aller vers les autres et réaliser ton humanité » !

— J’ajouterais même, dit Crassote en riant à nouveau, que se connaître c’est s’affranchir du regard des autres, car se reconnaître en tant qu’être unique c’est accepter la solitude qui lui est inhérente et c’est mettre fin à l’angoisse qui en découle.

« Connais-toi toi-même et tu connaîtras l’univers et les dieux. » disait mon propre Maître. Médite encore un peu là-dessus, disciple, rajoute malicieusement Crassotte.

— Maître, dit le disciple admiratif, je vous vénère pour votre enseignement.

— Disciple, répond Crassotte en plissant ses yeux pétillant d’intelligence et en gloussant toujours comme une poule, si tu continues ainsi tu pourras bientôt comprendre la signification de mon hilarité et en rire avec moi !

 

© Catherine Gaillard-Sarron 2008

Publié dans le recueil « Chemins de traverse » 2016

 L’inspiration

Ô Oui ! je te sens bien, inspiration ! Venir du dedans, venir du néant !

Je l’ai sentie, imperceptible d’abord, tel un souffle léger, aérien… inaudible presque, aile de papillon froissée se déployant soudain, fragile et magnifique hors de la chrysalide, rides frémissantes, vibrant à la surface de l’onde, bruissement de feuilles, vol de pollen. Puis elle a enflé, remontant par vagues, lentement, régulièrement du tréfonds de mon âme ; volcan éruptif, rivière gonflant et débordant de son lit pour déferler sur la plage de mon esprit, me submergeant tout entière de sa puissance créatrice.

Oui, je l’ai sentie respirer, palpiter à l’unisson de mon cœur, m’habiter, vivre en moi ! Feu secret et sacré, tapi au fond de ma conscience, embrasant mes pensées de ses flammes, crépitant dans ma tête, faisant jaillir de mon esprit des milliers d’étincelles et des gerbes d’émotions ; éclairant mes idées, m’illuminant de sa clarté.

Sentie s’installer en moi, devenir mes yeux et mes oreilles. Se fondre en une vison universelle, totale, embrassant, embrasant tout, révélant jusque dans l’infime et le détail, la totalité, l’essentiel ! Attestant la présence, du vent et de la Grâce dans le miracle transparent des ailes dorées des libellules, dans la délicatesse infinie des roses, ciselées, créées pour ne vivre qu’un jour, dans les flocons de neige, merveilles cristallines venues des cieux et recouvrant la terre noircie de pureté immaculée, dans l’insaisissable immatérialité de l’arc-en-ciel !

Ô muse divine ! je te sens venir gonfler mon cœur d’allégresse, ouvrir mon âme à l’ineffable, capter l’indicible, transmuer les mots en un langage subtil, réveiller tout ce qui sommeille et le révéler : éblouissement, éclatement noétique de milliards de particules d’où jaillissent l’esprit, la pensée, la vie ! Feu intérieur à la beauté sauvage, brûlante, qui ravage, réchauffe et purifie ; insatiable passion sur laquelle passe le souffle de l’amour, ineffable, qui crée, sublime, transcende et métamorphose en une symphonie flamboyante l’automne qui se meurt, en râles du vieillard agonisant les vagissements du nouveau-né.

Caresses de l’air, de l’eau ; chaleur du feu, odeurs, étreintes des corps, de la terre, nourricière, regards de lumière, gestes natures, voix du monde, eau, larmes, flux, baisers de vie !

Ô Oui ! je te sens bien, inspiration ! Venir du dedans, venir du néant !

© Catherine Gaillard-Sarron 1997

Dépression

La discipline de la souffrance, de la grande souffrance, ne savez-vous pas que c’est la seule discipline qui, toujours, a permis à l’homme de s’élever?  Nietzche

La dépression est une terre froide, aride, stérile, hostile, sans lumière. C’est un état de tristesse infinie, silencieux, sans joie et sans soleil dans lequel vous errez comme une âme en peine. C’est un tunnel étroit et obscur que la vie vous oblige à emprunter, à passer, sous peine d’y rester ou d’y trépasser. Tout y est noir, glacé. La solitude, inconcevable, y est immense, absolue. C’est extrêmement difficile à vivre, douloureux, incompréhensible. Vous êtes démuni et impuissant face à ce qui vous arrive et face aux autres qui ne le comprennent pas. Vous vivez au ralenti. Vous ne parlez plus, vous ne souriez plus, vous êtes comme un Zombie, absent, vidé de votre énergie vitale. Autour de vous, tout devient moins important, superficiel, tout perd son intérêt, comme si vivre se résumait à survivre. Coupé des autres, du monde, enfermé en vous-même comme dans une chrysalide, le temps se distord. Le film de votre vie ne se déroule plus, comme un arrêt sur image. Figé, emprisonné dans un présent qui semble s’éterniser, vous errez à la recherche de vous-même: cette bulle fragile que vous représentiez et qui vient d’éclater. Quête dérisoire mais nécessaire qui vous oblige à explorer les coins et les recoins de votre conscience afin de comprendre ce qui vous arrive.  

Au cours de cette décantation, de cette décomposition terrible et silencieuse de tout votre être, vous évoluez, cependant. Des changements s’opèrent en vous, modifient votre comportement, vos pensées. Mais nul ne mesure votre métamorphose. Personne ne peut imaginer ce que vous vivez, ce que vous éprouvez. Votre corps est là, cuirasse qui vous protège du monde et des autres mais, comme une étoile effondrée sur elle-même, vous n’êtes plus qu’un trou noir où disparaissent la joie et la lumière. En latence, oublié de tous, terriblement seul, vous poursuivez votre immersion dans les profondeurs de votre âme, descendant toujours plus profondément dans vos abysses intérieurs à la recherche des ces morceaux éclatés de vous-même. Et lentement, hors de tout regard, hors de tout jugement, vous vous retrouvez, vous vous recentrez, vous vous ancrez à cette Présence que avez rencontrée au fond de votre trou sans bord et sans fond et vous remontez, par paliers, vers la lumière et la vie…

Quand malgré la souffrance du corps vous ne voulez pas entendre ce que vous crie vôtre âme, la vie se débrouille et empreinte des chemins de traverse pour vous avertir que vous êtes en danger. La dépression est peut-être, paradoxalement, une ultime réaction qui vise à vous protéger, une stratégie générée par votre psychisme pour vous faire entendre raison et vous faire comprendre que vous vous êtes perdu dans le désir des autres. À cette occasion vous ne pouvez plus refuser la remise en question puisque, effectivement, il en va de votre survie. Mais bien sûr, tout ce processus apparaît comme libérateur et enrichissant une fois seulement l’épreuve dépassée.

Pour pouvoir vous en sortir, vous devez absolument en reconnaître les signaux et accepter cette pause brutale que la vie vous impose. Vous devez admettre votre fragilité, vos limites, vos blessures, vos fêlures, votre finitude, autant de failles par lesquelles la lumière viendra vous éclairer. Vous devez prendre conscience de vos émotions, de ce que vous attendez de l’existence, de vous, des autres. De toutes les façons possibles vous devez exprimer votre ressenti. Vous devez affronter vos angoisses, tout mettre à plat, analyser, comprendre, découvrir vos besoins, vos désirs, pardonner, vous pardonner, créer et enfin, oser vivre…

Il faut cesser de rêver sa vie et la vivre, quelle qu’elle soit, car il n’y a rien, rien de plus précieux que la vie !

© Catherine Gaillard-Sarron 1997

Handicaps-relations

Être handicapé c’est réinventer sa vie dans un monde qui rejette la différence mais qui, paradoxalement en est le véritable ferment.

Il ne voit pas… ou ne peut pas entendre. Il ne peut pas parler… ou tendre la main qu’il n’a pas. Il ne peut marcher, courir…ou simplement se tenir debout. Il pense le monde autrement quand le monde le pense autre. Aveugle, muet, sourd, difforme, emprisonné dans un corps différent, disgracieux ou déficient, « Il » est handicapé. Parfois il est né ainsi, quelquefois c’est la maladie ou un accident. Il ne ressemble pas ou plus aux autres et ce sont « les autres » qui le lui rappellent constamment. Les autres qui, par leurs regards apitoyés, condescendants, méprisants, ou indifférents l’informent, le sculptent et le figent dans sa différence.

Et pourtant qui, de l’handicapé ou de celui qui le définit, est le plus handicapé ? Est-ce uniquement nos manques qui déterminent ce que nous sommes ? Et si oui, qui peut se dire entier et complet ? Qui peut se dire « normal » quand la norme n’est qu’un critère, un principe établit en conformité avec des règles et des jugements qui fluctuent et varient selon les époques et les sociétés ? Le handicapé, au contraire de la personne qui se cache derrière sa « normalité », avance sans masque. Il ne peut dissimuler ses défauts ou ses carences et qu’il le veuille ou non, s’expose ainsi continuellement au regard de celui qui l’évalue. Mais l’exposition de ses faiblesses, aussi pénible et difficile soit-elle, le hausse au-delà de son juge car, en définitive, habitué à supporter le regard de la société sur lui, il finit par développer puis acquérir une force intérieure qui lui permet de s’aventurer là où l’autre, « le normal », ne s’aventurera peut-être jamais, car non contraint de s’y engager.  La seule différence entre le handicapé et celui qui ne l’est pas est la visibilité du handicap ou du manque. Et qui nous dit, avec la montée en puissance du génie génétique et la réactivation à travers lui d’une nouvelle forme déguisée d’eugénisme, que les secrets tapis dans les gènes des gens apparemment normaux ne les condamneront pas demain au même ostracisme, à la même exclusion ?

De fait, rien ne peut dispenser de cette cruelle expérience de la différence pour avancer dans la connaissance de soi et des autres. Et croire que la personne, « dite normale », peut faire l’économie de cette acquisition singulière est une illusion. En réalité nous sommes tous différents et nous avons tous des manques, nous sommes donc tous des handicapés. Et contre toute attente, c’est le manque qui nous fait évoluer et nous permet de nous dépasser. Le manque pousse à l’innovation, à la créativité, à la recherche de solution. Manquer c’est donc inventer, c’est découvrir, c’est compenser, c’est aller vers autre chose ; c’est chercher autrement ce qui manque !

Être handicapé c’est donc réinventer sa vie dans un monde qui rejette la différence mais qui, paradoxalement en est le véritable ferment. Ainsi, étrangement, grâce à ce cheminement intérieur, c’est celui « à qui il manque » qui se révèle souvent le plus entier alors que celui qui semble entier se révèle le plus souvent par ses manques. Évoluer c’est donc admettre ses manques ou ses handicaps et c’est admettre également tous ceux des autres. C’est oser les montrer et oser s’y confronter sans en concevoir aucune honte. C’est enfin accepter la différence comme la marque de l’imperfection humaine.

Évoluer c’est aussi arrêter son regard, non sur ce qui n’est pas, mais sur ce qui est : « l’Autre » tout simplement ! Semblable mais pourtant différent, pareillement digne et pareillement égal, car, que savons-nous de ce qui nous attend ? Et ne pas changer aujourd’hui notre regard sur ce qui nous semble différent, c’est valider tout ce qui pourrait nous exclure demain.

 © Catherine Gaillard-Sarron 17.03.04

Voir ou ne pas voir?

Nous ne voyons pas le monde tel qu’il est, mais tel que nous sommes. Kant

Les gens croient que ce qu’ils pensent est juste et vrai, et selon leur point de vue cela est juste et vrai. Mais ce qu’ils pensent passe à travers le filtre de leurs émotions et cela modifie la perception qu’ils en ont. Impliqués émotionnellement dans ce qu’ils pensent, ils ne sont pas capables d’une réelle objectivité. Ils projettent sur l’autre leurs émotions, leurs schémas, leurs façons de voir les choses. Ce qu’ils voient n’est pas la réalité. Il y a une sorte de distorsion de la réalité. Une distorsion de la perception. Ce qu’ils perçoivent est réel mais ce n’est pas la vérité. 

La vraie réalité des choses n’existe pas. Ou alors elle existe mais personne ne sait la voir vraiment car, tous, nous la percevons d’une manière différente. D’une certaine façon, chacun de nous est un monde à part entière : avec sa topographie, son environnement particulier, ses codes, ses lois, ses idées, son langage etc.

Au bout du compte, sans s’en être vraiment conscient, nous nous mentons constamment, et nous mentons également aux autres. Et si nous nous mentons et que nous mentons aux autres, c’est parce que nous avons peur de la réalité. Nous avons peur de la voir telle qu’elle est et, plus que tout, nous avons peur de nous voir tels que nous sommes. Alors, pour supporter ce que nous ne pouvons accepter de voir, nous travestissons la réalité et recourons aux faux-semblants. Nous la recouvrons des oripeaux de la mauvaise foi, nous l’habillons des haillons du mensonge. Nous sommes des voyants non-voyants et nos lunettes sont plus noires que celle des aveugles. 

Tous, nous nous voyons différents de ce que les autres voient…. et pourtant ce que les autres voient existe aussi ?

Alors, quelle est la réalité ? Et qu’est-ce qui est vrai ? Ce que l’on voit ou ce que l’on pense voir ? Ce qui est ou ce que l’on croit être ? Ce que l’on croit voir et qui pourtant n’est pas ?

Voir vrai, c’est peut-être renoncer à ses émotions. C’est déshabiller son regard de tout sentiment intérieur. C’est aller vers les choses qui nous sont données à voir le regard nu et vierge de tout préjugé. C’est poser son regard sur chaque chose comme si c’était la première fois qu’on la voyait. C’est ouvrir ses yeux et regarder le monde tel qu’il est. C’est enfin apprendre à voir ce qui est et seulement ce qui est.

© Catherine Gaillard-Sarron 03.02.04

Faim d’amour

Comme d’un plat exquis on ne peut, une fois rassasié et malgré son envie, manger encore, je ne peux aimer plus que j’aime. Et bien que je sache que le plat, comme celui que j’aime, puissent m’être enlevés, je ne peux ni manger, ni aimer plus que je le fais, au moment où je le fais.

Je constate douloureusement qu’il est impossible, en une seule fois, de combler, de remplir, et pour la faim et pour l’amour, le besoin infini qu’on peut en avoir.

Je peux mettre en réserve les choses que j’aime manger, mais je ne peux faire de même pour l’amour et le besoin que j’en ai ; on ne se rassasie jamais de ceux qu’on aime. Et c’est là, la source de mon désespoir ; constat de mon impuissance à garder et retenir auprès de moi, malgré mon attachement, ceux que j’aime, mais qui ne m’appartiennent pas, et sur lesquels mon amour n’a pas de prise.

J’ai besoin de ceux que j’aime tous les jours pour vivre, à l’instar de la nourriture ou de l’air que je respire. Je sais aussi que cela n’est pas raisonnable car cette attache m’aliène et les aliène également, enfermant la relation dans un lien étouffant et malsain.

L’amour serait-il de lâcher prise ?

Puisque l’attache, en définitive,  n’attache que celui qui se laisse attacher ! L’autre restant libre de se laisser attacher… ailleurs.

Comment, dès lors, se nourrir de l’autre sans le dévorer, sans l’absorber. Comment se nourrir de l’autre en le laissant entier tout en lui permettant de se nourrir de soi. Comment nourrir l’autre de ce que je suis… Comment le nourrir sans se laisser « manger » et sans le « manger »!

…En déliant le lien peut-être, en lâchant prise de ce qui semble besoin pour aller vers l’échange, le partage, l’offrande de soi, sans attente, le don total ! En respectant l’autre et son intégrité, son espace et sa solitude ; en accédant au statut d’adulte libre !

Parce que j’aime celui que j’aime, je veux devenir libre et me lier à lui sans l’attacher, le nourrir de moi sans le gaver, me faire aimer de lui sans le « bouffer »… et qu’il devienne cet autre pour moi aussi.

 

© Catherine Gaillard-Sarron 11.02

 

Du rien au tout

Quand je suis partie arpenter les chemins, mon cœur était plein… plein de choses inutiles. Et il sonnait creux… creux du vide qui l’habitait. Il était lourd dans ma poitrine et pesait sur chacun de mes pas, laissant dans la terre molle l’empreinte de son poids.

Puis, tout en marchant, j’ai respiré le vent, j’en ai humé les odeurs. J’ai entendu le murmure de l’eau et des feuilles qui frémissaient sous la brise. J’ai regardé le paysage qui étincelait sur l’horizon et les oiseaux qui le traversaient d’un trait d’argent. J’ai contemplé les nuages qui jouaient avec le soleil et la lune opalescente accrochée aux montagnes. Tous les sens en éveil j’ai levé les yeux vers le ciel et mon regard s’est élargi à son immensité. Parcourue d’un souffle inconnu, mon âme, tel un oriflamme, s’est déployé dans l’espace et mon cœur s’est ouvert. Il s’est ouvert en grand et le vide qui l’habitait a soudain disparu.

Alors je l’ai rempli à ras bord de soleil, de senteurs et de vent. Je l’ai rempli de tout ce que je respirais autour de moi dans la nature ; rempli comme un ballon de tout ce que je voyais, entendais, percevais et ressentais, l’allégeant de tout ce qui obstruait ma pensée, de tout ce qui me faisait mal… de tout ce qui m’encombrait.

Je l’ai empli de Présence et de silence, évacuant le tumulte et la solitude. Empli de paix et de sérénité, chassant la frénésie et la vacuité du monde. Je l’ai empli de l’indicible et du subtil qui imprègnent toute chose.

J’ai regardé et j’ai vu tout ce qui échappait aux hommes.

J’ai vidé mon cœur de son rien pour le remplir du Tout.

Un instant, j’ai goûté à la félicité et j’ai été touchée.

Texte publié dans le recueil Extrêmes Limites 2007

Reflet divin

Il y a une étoile, mise dans le ciel pour chacun de nous, assez éloignée pour que nos erreur de viennent jamais la ternir.

Christian Bobin dans Ressuscité

Parce que je crois que la vie, que ma vie à un sens, qu’il existe quelque chose ailleurs, qu’une entité existe, supérieure et immanente au-dessus des humains, me vient une idée qu’il me plairait de voir devenir vraie !

Si je pars du principe que Dieu n’existe pas, alors ma vie ne peut qu’avoir un sens terrestre avec la finitude et la mort qui lui est rattachée, mais si je crois en Dieu, alors le ciel, l’univers entier me sont ouverts et je peux espérer, d’une manière ou d’une autre, m’y dissoudre, m’y perdre peut-être, mais, qui sait ? Peut-être aussi m’y régénérer voire y ressusciter un jour !

Mon hypothèse est la suivante : Ce que nous sommes sur la terre ne serait que le reflet de nous-mêmes ; notre vrai moi, notre vrai être serait auprès de Dieu (on postule qu’Il existe). Prés de lui, notre véritable nature, sans frein ou inhibition aurait eu tout loisir de se développer harmonieusement tandis que sur la terre, soumise, manipulée, contrainte à la vie, elle ne se développerait pas bien et ne représenterait donc que le pâle reflet de ce que nous serions réellement. Mais cette étape terrestre serait nécessaire pour mesurer à sa juste valeur le bonheur que nous retrouverons à notre mort.

Nous avons le sentiment du beau, de l’amour, de la justice et de la compassion en nous parce que tout cela existe déjà en nous, accordé par Dieu. Sur la terre notre reflet s’en souvient, bien que cela soit profondément enfoui et ne resurgisse qu’à certains instants, particuliers et rares. Toutes ces choses seraient un héritage de Dieu qui nous les rappellerait à travers la conscience dont Il nous a dotés.

Si une âme est consciente et qu’elle croit en Dieu, plus qu’une autre elle cherchera, par tous les moyens, à aller vers cette perfection divine qu’elle pressent.

Quand le reflet humain meurt, l’âme se retrouve telle qu’elle a toujours été, vierge de l’empreinte des hommes ; et c’est la révélation et la renaissance merveilleuse. Naître enfin à soi-même !

Car nous avons le choix, le libre arbitre, et chacun peut choisir d’aller vers ce qu’il pressent en ouvrant totalement son cœur et son âme à Dieu. Alors comme une porte qui apparaîtrait de façon magique, quelque chose s’ouvre en nous ; une réaction mystérieuse se produit et réactive ce qui existait déjà mais était en veilleuse, en attente. Dès lors une attraction irrésistible s’opère et mène inexorablement l’individu vers «  L’Aimant Central », Dieu,  qui par son amour crée l’attraction nécessaire à la réunion du reflet et de la vraie personne.

Notre ombre dans la lumière nous rappelle peut-être que nous ne sommes qu’un reflet…

© Catherine Gaillard 22.6.02

MST Maladies socialement transmissibles

Et si dans un avenir proche le chômage était assimilé à une maladie contagieuse ?

En dépit des progrès de la médecine et de l’éradication de certaines pathologies infectieuses, de nouvelles maladies voient sans cesse le jour, générées par l’homme et ses agissements directs ou indirects sur son environnement. Il en est une, particulièrement, qui sévit depuis quelques temps et se développe de façon alarmante. Issue de la conjoncture économique, de la mondioglobalisation, du progrès technologique et scientifique et surtout, de l’avidité gloutonne et cupide des grands trusts actuels, ce chancre du profit, propagé par de multiples fusions, ronge et détruit le fondement même de notre société. Cette nouvelle maladie, dénommée « chômage » vient gonfler le fléau des MST (maladies socialement transmissibles) et jouit aujourd’hui d’un terrain absolument idéal à sa propagation et à sa dissémination.

Véritablement contagieux, le « chômage » contamine des régions entières et touche indistinctement hommes ou femmes dans la force de l’âge et dans la tranche active de la population. Par ses vagues successives, il attaque de manière irréversible le système immunitaire de toute une population et met en péril le fragile équilibre qui maintenait une cohésion sociale.

Les atteintes se manifestent de plusieurs façons et graduellement. Au début de la maladie, des pathologies diverses, aussi bien physiques que psychiques se développent de manière anarchique alors même que l’organisme était sain au préalable. Il est urgent d’intervenir au plus tôt pour tenter de combattre l’infection car si aucun traitement n’est entrepris pour soigner et soulager le malade, ce dernier tombe rapidement dans une sorte de prostration et de dépression avec forts risques de dépendances diverses voire de suicide ou d’automutilation. À contrario, l’atteinte peut également se manifester par de la violence et un puissant désir d’autodestruction qui peut conduire à de la délinquance voire à la criminalité.

Dans tous les cas le malade est dangereux : pour lui-même ou pour la société ! En outre, cet état maladif génère une forte propension à la paupérisation et gangrène de façon dramatique le tissu du corps social et économique de la région où sévit la maladie.

Actuellement, seuls les enfants semblent être épargnés par le fléau. Néanmoins, les conséquences désastreuses de l’infection qui touche les parents précarisent déjà la progéniture de ces derniers. Si rien ne vient endiguer le processus, il est probable que la contamination touchera également les enfants, favorisant dès lors l’apparition de nouveaux foyers, voire une résistance à la maladie ou pis, l’émergence de nouvelles souches.

Cette affection, qui prend de plus en plus la forme d’une épidémie voire d’une pandémie pourrait, si rien n’est fait pour l’enrayer, pousser les autorités à prendre des mesures sanitaires extrêmes comme la quarantaine et à exclure des villes toute les populations contaminées.

Les questions sont alors posées !

Existe-t-il vraiment, dans notre société déclinante et à l’individualisme forcené, une volonté véritable de rechercher et d’apporter des solutions concrètes à cette calamité actuelle ?

Car il faut le reconnaître, de plus en plus considéré comme un pestiféré par une communauté qui le rejette et se désolidarise de sa souffrance, le chômeur est devenu la victime propitiatoire d’une économie boulimique et vampirique. Directement contaminé par les manipulations de pseudos scientifiques analystéconofinanciers avides de pouvoir et d’argent, il paie de sa chair et de sa vie le désir de puissance absolue des plus grands. Véritable sacrifice vivant offert au dieu Profit !

Rendu dorénavant obsolète et inutile par la progression et l’expansion fulgurante des technologies du futur : informatique, génétique, robotique, biotechnologie, nanotechnologie, sciences cognitives, etc., ce chômeurisé erre dans un univers où il n’a plus sa place, devenu, paradoxalement, une sorte de toxine secrétée par un système nommé ultralibéralisme qui cherche à présent à l’éliminer pour devenir encore plus efficace et rentable.

Et si des crédits sont débloqués, le seront-ils dans l’investissement d’un remède au chômage, ou plutôt dans l’élaboration d’un contrepoison afin d’accélérer le processus de désinfection déjà en cours ?

En attendant, est-il juste d’entasser et de parquer les chômeurs dans des mouroirs à la périphérie des villes alors que les vecteurs principaux de la maladie ne cessent de se développer avec toujours plus de virulence et d’impunité ?

© Catherine Gaillard-Sarron 1998

Écoute

S’il est vrai qu’écouter l’autre c’est le respecter, alors personne ne respecte personne, car personne n’écoute personne !

Enfermés en nous-mêmes, attachés à notre vision du monde, nos principes, nos attentes, nos exigences, nous ne nous intéressons à l’autre qu’en fonction de nos besoins ou de nos intérêts. Nous sommes égoïstes et ce sont les intérêts des uns et des autres qui tiennent le monde ensemble, pas l’amour.

Nous utilisons l’autre, quel qui soit, nous le manipulons, nous le séduisons, nous le soudoyons, nous l’exploitons mais nous ne l’aimons pas. Pour aimer, il faut être à l’écoute. Il faut de la confiance et du respect. Mais qui écoutons-nous le plus souvent ? L’autre ou nous ? Qui aimons-nous véritablement ? L’autre ou nous ?

Nous voulons que l’autre comble nos manques, qu’il nous apporte ce qui nous fait défaut. Mais l’autre est comme nous et il cherche les mêmes choses que nous, il agit donc de la même manière que nous, d’où le chaos du monde.

Tous nous cherchons l’amour, l’attention et la compassion des autres. Tous nous attendons le pardon pour nos fautes et l’acceptation de nos défauts. Tous nous souffrons de n’être pas suffisamment aimés ou rejetés. Pourtant, la plupart du temps, nous nous révélons incapables d’offrir cette générosité, cette mansuétude ou cette bienveillance que nous exigeons des autres.

La vérité est que nous cherchons tous un amour qu’aucun de nous n’est vraiment capable de donner.

Nous ne savons pas aimer car pour aimer il faut être à l’écoute, non pas de ses besoins mais de ceux de l’autre. Et la majorité d’entre nous en est incapable car exclusivement centré sur lui-même et à l’écoute de ses propres besoins. C’est pourquoi l’homme n’a d’autre ressource que de se tourner vers Dieu. Il en a besoin.

Les hommes étant incapables d’amour, Dieu a donc bien sa raison d’exister puisqu’Il est le seul à pouvoir leur en donner et à les aimer tous sans condition...

  © Catherine Gaillard-Sarron 22.06.02

« Infemmie » ou « Ignhominie »

La femme contient le problème social et le mystère humain. Elle semble la grande faiblesse, elle est la grande force. 

Victor Hugo Extrait du Actes et paroles

Servantes, serveuses, boniches, domestiques ou femmes de chambre, nurses, bonnes, gouvernantes, employées de maison ! Quelle différence quand les hommes pleins d’arrogance et de mépris les prennent toutes pour des putains !

Femmes de ménage, femmes de bureau ! c’est du pareil au même. D’un coin du monde à l’autre partout le même topo ! Une femme ici vaut une femme là mais elle vaut moins qu’un homme même si c’est un vaurien.

Est-ce à dire qu’à leurs yeux une femme vaut moins ? Qu’à leur donner la vie fait d’elles des putains ?

Coiffeuses ou pédicures, esthéticiennes, cuisinières, mères de famille, diététiciennes, aides-soignantes ou infirmières, sages-femmes, puéricultrices, mannequins, tops, courtisanes, masseuses, danseuses, prostituées, strip-teaseuses et même religieuses !

Elles s’occupent des corps, des hommes et des enfants, des malades et des vieux, des humeurs et des poils, des fèces et de la crasse, de ces choses infamantes qui dégoûtent les hommes.

Vendeuses ou couturières, agricultrices, vigneronnes, commerçantes, maraichères, boulangères, bouchères ou concierges, opératrices, institutrices, artisanes, policières, chauffeuses, ramoneuses, secrétaires, journalistes ou conseillères, employées de banque, de commerce, cheffes d’entreprises, architectes ou médecins, comédiennes, chanteuses, danseuses, artistes en tous genres !

Elles ne sont qu’ouvrières, blanchisseuses du monde, abeilles laborieuses se tuant à l’ouvrage, cantonnées aux corvées et aux basses besognes, aux niveaux inférieurs de l’échelle sociale.

Et ne parlez pas d’ingénieures, de professeures ou d’écrivaines ! Et encore moins de proviseures, préfètes, docteures ou Chevalières ! On leur concède magistrates, juges, banquières ou avocates, mais pas auteures ou procureures, ni brigadières ou commandantes, à peine tolère-t-on bâtonnières et en aucun cas la ministre !

Dans tous ces métiers masculins qu’elles invertissent avec brio, des hommes imbus de leur pourvoir et inquiets de leur progression, leur reprochent avec virulence cette orthographe iconoclaste. Sous couvert de langue française ils protègent leurs territoires abusant de ces « Droits de l’homme » qu’ils accordent si peu aux femmes leur déniant la reconnaissance qui ferait d’elles des égales.

Il semble qu’à leurs yeux une femme vaut moins  et qu’ils préfèrent encore qu’elles restent des putains !

Devant cette inique infemmie,  je rêve d’un monde épicène où chacun quelque soit son sexe pourrait y vivre et s’épanouir. Je rêve d’un monde plus juste, débarrassé de ces clivages qui tout en desservant les femmes empoisonnent le monde entier ;  d’un monde où les êtres enfin libres du poids de ces déterminismes verraient enfin cette évidence qu’il n’y a qu’un seul genre humain.

Mais domestiques ou femmes de chambre, serveuses, sportives ou présidentes ! C’est du pareil au même, d’un coin du monde à l’autre partout le même topo !

Femmes de bureau, femmes de ménage, quelle différence quand les hommes les traitent toutes comme des putains ?

  © Catherine Gaillard-Sarron 1.6.11

Garde-fous

« On peut se battre contre l’invasion d’une armée mais pas contre une idée dont le moment est venu ! » Victor Hugo.

Il transgresse les principes et les lois millénaires, mélange, transforme, transmute la matière, la redéfinit, la reconstruit, la trahit !

Le transgénéticien traque, séquence, brade et manipule à l’envi nos origines et notre patrimoine. A l’infini il combine et recombine, recompose et s’approprie ce qui appartient à tous. Il dépossède l’humain de son humanité, réduit le vivant à une valeur marchande et au profit. Il remet en question l’essence même de l’homme – le profane – lui vole sa mémoire, ses pensées et sa conscience le ravalant dans cette nouvelle société, à un produit de consommation en série.

En son nom et celui du progrès, on dépouille, spolie et pille les pays de leurs richesses et de leurs diversités, brevetant à tour de bras tout ce qui vit ; matière première par excellence des sorciers de demain.

Inconscient ou indifférent à ce qu’impliquent ses recherches, le transgénéticien clone, duplique et réplique avec exaltation. Il modifie, désorganise, efface de manière irréversible la mémoire du vivant et de la nature, tuant la diversité, brisant l’harmonie, semant le chaos, pervertissant et dénaturant par ces actions l’ordre et l’âme du monde.

Le monde de demain est aux mains d’apprentis sorciers qui jouent sans gêne avec les gènes de la vie. Bouleversant le monde ils veulent changer la donne, créer de leurs mains un nouvel homme, une nouvelle race, de nouvelles espèces. Ils veulent jouer à Dieu, « fabriquer » du vivant !

Dans ce monde où les nouvelles limites sont celles de l’imagination, où les frontières physiques et biologiques n’existent plus, où les seules lois sont celles du marché et du fric, où les croyances et l’espérance auront disparu, que deviendront les hommes ?

Soumise à la folie démesurée des scientifiques, nouveaux dieux modernes de la civilisation « High Tech », l’humanité devient matière première biologique, matière à créations, à actions, otage d’une dérive mercantile et industrielle qui réinvente et façonne la vie en laboratoire.

Après avoir volé à l’homme sa liberté, son intelligence, sa mémoire, ses pensées et sa conscience, on le dépossède à présent de ses cellules et de ses gènes. On le déconstruit, on le reprogramme, on le recrée, on le fait disparaître !

L’homme moderne a mis en marche sa propre disparition, le monde de demain ne lui appartiendra plus. Etranger sur sa propre planète avec pour seuls dieux, les machines, les chimères et les monstres qu’il aura lui-même créés, l’homme aura cessé d’être un homme !

Il avait été créé à la ressemblance de Dieu, il veut aujourd’hui créer des créatures à sa ressemblance.

Changer ou disparaître ?

Dans un monde où Dieu n’existe plus qui pourra nous garder des fous ?

« Science sans conscience n ‘est que ruine de l’âme !» Rabelais

« Et si l’aventure humaine devait échouer… » Théodore Monod

 

© Catherine Gaillard-Sarron 2003